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Epistoles-improbables - Blogue-notes de Jean Klépal

Au fil d’une lecture, considérer l’événement

16 Janvier 2016 , Rédigé par Blogue-note de Jean Klépal Publié dans #Attentats ; Etat d'urgence

C’est un petit livre écrit par un historien, professeur au Collège de France, et un cinéaste écrivain, à la suite des assassinats de janvier 2015, à Paris[1].

Mon propos consiste uniquement en une série de citations, passages soulignés au fil de la lecture. Donc propos partial.

Les auteurs parlent de la présentation d’un état d’esprit susceptible d’engendrer un débat. J’espère modestement y contribuer :

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« (Nous étions évidemment passés auparavant) par une série de décompositions démocratiques profondes.

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(Le 7 janvier) Chacun des petits personnages de ce qui s’écrira d’emblée comme « page d’histoire » va dire « Je suis Charlie » ... ils ne vont pas nous tuer tous quand même ? D’une certaine façon si...

Il y avait des morts ... faire le compte de ce qu’ils endeuillaient en nous.... la guerre, elle nous désoriente et nous ensauvage.

L’effet anesthésiant de ces flux d’images, déversés par les chaînes d’information continue...

Le plus effrayant : il y eut quelqu’un pour filmer cela de son balcon.

On s’est ingénié dans les jours qui suivirent à prouver que la liberté d’expression ne pouvait pas mourir – mais en est-on certain ?

La colère vient des années soixante-dix : le recours à la violence d’une partie de l’extrême gauche (mais aussi de l’extrême droite, en Italie particulièrement).

Perception (officielle) d’une dérive suicidaire pour occulter la masse des questions (adressées à la société).

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(Depuis lors) Accroissement de la violence symbolique exercée sur les individus par le capitalisme.

... les guerres lointaines du monde occidental ne peuvent se dire et se voir qu’à la manière d’opérations de police ... dans deux jours, on se surprendra à crier de bon cœur « Vive la police ! » pour rendre hommage aux dessinateurs assassinés de Charlie hebdo.

Nos corps poreux se laissent gagner par le lexique guerrier.

(À propos des « théâtres d‘opérations extérieures ») Théâtre : on y est spectateur et les rôles sont joués par des professionnels – Opération : la guerre une technique chirurgicale – Extérieure : au plus loin.

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(A Toulouse mars 2012) Assassinat d’un parachutiste français d’origine marocaine, deux militaires français d’origine algérienne, un militaire français d’origine guadeloupéenne est laissé pour mort, professeurs et rabbin, des élèves...

(Le musée juif de Bruxelles, mai 2014) après tout cela qu’avons-nous fait, sinon commencer à nous y habituer ? C’est ce qu’ils veulent.

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(Les tueurs de janvier 2015) La misère ? Peut-être, mais pas celle de la relégation, de l’exclusion ou de la pauvreté. La misère houellebecquienne des sentiments, des valeurs et des identités ... mélange de sentimentalisme et de désir d’action (qui) ne trouve pas d’autre issue que la grande cause mondiale de l’islamisme politique.

(Khaled Kelkal en 1995, Mohammed Merah en 2012) la vie banale, hésitante et fragile de jeunes Français de confession musulmane.

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(Le 11 janvier) La mention « Je suis Juif » ou « Je suis flic » était plus fréquemment brandie que « Je suis musulman » ... l’identité la plus absente était « Je suis athée ».

Spectacle stupéfiant que de voir l’ovation faite aux forces, armées et de l’ordre, et, à travers elles, le compliment adressé au trio Hollande, Valls, Cazeneuve. ... La situation a de l’envergure, elle les hisse au diapason.

Une quarantaine de chefs d’Etat et de gouvernement sont venus des quatre coins du monde fouler une centaine de mètres du pavé parisien, être là une dizaine de minutes, aux côtés des milliers et milliers de Parisiens, et incarner cette vision moderne du corps du roi, dans les rues de Paris les corps des manants ne sont pas à la traîne, ce sont plutôt les rois qui le sont.

Le blasphème comme la caricature sont une hygiène de la pensée...

On parle des dix-sept morts de ces trois rudes journées, alors qu’ils sont vingt. Il y a, incontestablement, dix-sept victimes, mais vingt morts ... personne n’en voulait de ces trois corps là.

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(14 janvier) assassiner des Juifs, des musulmans sous l’uniforme français et des journalistes de Charlie hebdo, c’était frapper ceux que l’on n’aime vraiment pas sans pouvoir se l’avouer, c’était raviver de vieilles blessures, administrer aux foules assemblées une fulgurante leçon

d’histoire.

Le djihadisme nous oblige à considérer le fait que le carnage organisé s’est inventé en même temps que la démocratie.

Laïcité : qui dira que ce que nous exigeons des musulmans, aujourd’hui, jamais la République ne l’a obtenu des catholiques...

Il arrive aussi que les dangers annoncés ne soient pas ceux qui font le plus de mal, et que c’est en croyant les prévenir qu’on précipite le pire.

Du 7 au 11 janvier, les représentants politiques de la France ont porté une parole publique que l’on aurait pu croire plus irrémédiablement dégradée ... voyez, depuis, comment ils se relâchent : c’est que nous les serrons plus d’assez près ... le temps presse ... Tout est à refaire.

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[1] Patrick Boucheron / Mathieu Riboulet – Prendre dates (Paris, 6 janvier-14 janvier 2015) – Verdier 2015, 137 p.

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