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Epistoles-improbables - Blogue-notes de Jean Klépal

"Ce qu'il aurait fallu"

28 Mars 2017 , Rédigé par Blogue-note de Jean Klépal Publié dans #PS ; S. Royal ; Sarkozy ; Intermarché ; Presse périodique ; Publicité ; Politiciens ; Election présidentielle, #; Georges Perec

Dans une plaquette de 16 pages, éditée par l’Atelier contemporain[1], Christophe Fourvel[2] évoque des événements politiques et des faits sociaux que nous avons tous présents à l’esprit.

Ce texte bref, écrit comme une litanie proche du Je me souviens  de Georges Perec, recense une partie de ce qui fait symptôme dans notre quotidien.

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Les turpitudes et les mensonges de nos dirigeants ne sont possibles qu’à l’aune de  nos indifférences ou de nos tolérances, c’est à  dire de nos capitulations.

Celles-ci ont commencé avec les fameux cadeaux Bonux annonciateurs de la corruption du consommateur par le marchand de lessive : Si tu achètes mon produit, je t’offre un cadeau spécial à découvrir, à  chaque fois différent (en échange de ton asservissement à la marque).

« Il aurait fallu se méfier des cadeau Bonux » ouvre  le propos.

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Dans une note accompagnant l’envoi de la plaquette, l’auteur confie qu’il a eu l’idée de cet écrit lors d’un débat d’entre deux tours de la présidentielle de 2007.

(Il aurait fallu) « Qu’en 2007, le Parti socialiste ait porté à la candidature présidentielle une femme qui sache quoi répondre à un homme disant : à quoi ça sert les RTT, quand on n’a pas de quoi payer des vacances pour ses enfants ? »

Se montrer dans toute sa goujaterie et n’envisager le temps libre que sous l’angle de la consommation touristico-vacancière, est évidemment insupportable. L'absence de réponse en termes simples de qualité de vie est évidemment inadmissible, et révèle une bien faible prise en compte de données essentielles.

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Des notations apparemment bénignes mettent opportunément en lumière des incongruités pernicieuses auxquelles nous ne prêtons plus suffisamment attention, tant elles sont désormais intégrées :

(Il aurait fallu)

- « Qu’Intermarché n’ait pas associé son nom à celui des Mousquetaires »

- « qu’un nombre significatif de maisons de la presse refusent d’afficher les couvertures de Gala, Closer, Paris Match, VSD, Voici, sur leurs vitrines. »

- « Ne jamais commercialiser de raviolis en boite. De carottes déjà râpées. Que la mention Vu à la télé n’ait jamais été déposée. »

- « ne pas vendre la première chaine de télévision à un marchand de béton. »

- « s’étonner plus tôt que l’on puisse être de gauche et créer une clinique de chirurgie esthétique spécialisée dans l’implant capillaire. »

- « ne pas laisser le soin à sa voiture, à ses chaussures, de décliner pour nous notre identité. »

- « Que l’on soit capable de ne pas acheter des produits Ferrero ou Nestlé quand nous sommes en colère contre Ferrero ou Nestlé. Que nous ayons un peu plus de suite dans les idées. »

- « qu’il n’y ait pas du tout de sandwichs en vente avec de la mayonnaise. Et mieux défendre la pratique du cerf-volant contre celle du quad. »

Etc.

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L’auteur conclut ainsi la note de présentation de son travail :

« Ce qu’il aurait fallu ... (énonce) quelques consignes à prendre en compte pour bâtir un monde un soupçon plus exigeant, et donc meilleur. Qui réhabiliterait une certaine qualité de vie et mettrait au placard les ersatz, les faux-semblants, les paillettes... »

L’ensemble est clair, l’humour et la dérision apparente permettent de prendre du recul. Ils préservent du catastrophisme, et rendent attractif ce texte hautement salubre.

(Il aurait fallu) « Ne pas bêtement faire porter aux  hommes politiques les maux que nous entretenons tous. »

Les maux dont nous souffrons tous ne sont pas imputables aux seuls hommes politiques, c’est vrai. Nous n’avons que les politiciens que nous méritons en grande partie.

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Grâce à des outils aussi accessibles que cette plaquette, la prise de conscience de notre responsabilité personnelle dans le marasme où nous pataugeons pourrait peut-être entraîner un sursaut. Il n’est sans doute pas trop tard pour l’envisager.

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A l’orée de la campagne présidentielle officielle, il apparait que l’abstention ou le vote blanc ne sont peut-être pas aujourd’hui les mieux adaptés aux graves défis du moment. La volonté d’une nécessaire rupture fondamentale, contraire au renoncement qualifiant le vote « utile », pourrait semble-t-il trouver à s’exprimer au premier tour.

 

[1] « Ce qu’il aurait fallu », Christophe Fourvel, l’Atelier contemporain éd., mars 2017, 16  p. -  5 € - Diffusion : Entre Livres – Distribution : Belles Lettres Diffusion Distribution (BLDD).

[2] Ecrivain chargé de mission au Centre Régional du Livre de Franche-Comté, à Besançon.

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