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Epistoles-improbables - Blogue-notes de Jean Klépal

A caminar... (2)

4 Juillet 2017 , Rédigé par Blogue-note de Jean Klépal Publié dans #B. Pascal Pensées, Voltaire, J. Prévert, F. Pessoa, V. Segalen, Cioran, Descartes, passé-présent, amitié, archétypes

(suite de l’article publié le 29 juin 2017)

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Vivre est-il vraiment si compliqué ? Pourquoi tant aimer la confusion, même si parfois elle permet des relations aussi passionnantes, et surprenantes, que celles d’un homme et d’une femme ?

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Archétypes 

Rôle capital de la crainte de l’inconnu, c’est-à-dire du non savoir. Quoi que l’on prétende, l’ignorance l’emporte.

Pourquoi l’inconnaissance est-elle si difficile à admettre ? Quelle piètre vanité pousse à vouloir expliquer ou justifier ce qui échappe ?

Quelle naïveté, quel attrait de la soumission, valident les fables ?

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En dépit de son intérêt, le printemps d’après demeurera inaccessible à jamais. Alors, pourquoi s’en préoccuper ?

Cueillir dès aujourd’hui les roses de la vie...

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Aller et venir, se dresser, lever la tête, prendre des poses, viser des situations ?

Sottise consternante, si puissamment ancrée.

Comme l’issue est imparable, autant s’y préparer en s’y accoutumant.

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Paradoxe encore très commun : perdre sa vie sous prétexte de la gagner.

Pascal (Pensées) :

Quand je m’y suis mis quelquefois, à considérer les diverses agitations des hommes, et les périls et les peines où ils s’exposent, dans la cour, dans la guerre, d’où naissent tant de querelles, de passions, d’entreprises hardies et souvent mauvaises, j’ai découvert que tout le malheur des hommes vient d’une seule chose, qui est de ne savoir pas demeurer au repos, dans une chambre. (Si on enlevait aux hommes toutes les charges, occupations et responsabilités auxquelles ils tiennent) ils se verraient, ils penseraient à ce qu’ils sont, d’où ils viennent, où ils vont ; et ainsi on ne peut trop les occuper et les détourner. Et c’est pourquoi, après leur avoir tant préparé d’affaires, s’ils ont quelque temps, s’ils ont quelque temps de relâche, on leur conseille de l’employer à se divertir, à jouer, et à s’occuper toujours tout entiers.

Les hommes n’ayant pu guérir la mort, la misère, l’ignorance, ils se sont avisés, pour se rendre heureux, de n’y point penser.

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Voltaire :

Essayez le bonheur, parce que c’est bon pour la santé.

Jacques Prévert :

Tu veux être heureux, eh bien sois-le !

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Incohérence

Pourquoi se soucier davantage de l’après que de l’avant ? De l’amont vertigineux seule l’existence est certaine. Puits sans fond à explorer. Pourquoi pas ? Mais alors s’arrimer solidement à la margelle.

Souvent irrémédiable orphelin du passé, le risque est de vivre trop préoccupé d’un avenir très improbable sur lequel nous projetons nos angoisses.

Les fables, les mythes, les religions, et les fanatismes se nourrissent de ce terreau.

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Aller son chemin sans forcer le pas, comme un randonneur aguerri.

Chaque jour accepter de s’amputer d’un infime quelque peu pour s’enrichir de ses pertes et pouvoir reconnaitre puis accepter l’inattendu. Lorsqu’il se présente, celui-ci peut être une chance, pour peu que nous sachions la discerner.

La combinaison de nos pertes édifie et consolide ce que nous sommes en permanence en train de devenir. Tout commence toujours sans cesse.

Accepter l’inéluctable, peut-être seule voie d’accès à la bienfaisante intranquillité du bonheur.

Fernando Pessoa, l’intranquille exemplaire.

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Vivre : un long hasard semé d’imprévus. Des actions demeurent dans le sillage. Conviendrait-il de s’y référer plus qu’à d’autres ?

Peut-on raisonnablement tenir à un souvenir ? A moins que la mémoire ne soit un ferment toujours actif du présent.

A quoi rime une vie ? Quel intérêt ? Pourquoi ? Peut-être parfaitement inutile.

Exister, disparaitre, ne change rien et passe le plus souvent totalement inaperçu. Insuffisant pour s’ériger en fait divers ou en chien écrasé.

Le regard accueillant de Segalen opposé à l’amertume de Cioran.

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Importance de l’amitié et de la fidélité : aussi fragiles qu’une porcelaine, une simple fêlure peut leur être fatale.

L’amitié, terme galvaudé car générique. Plante délicate très précieuse, très rare, une espèce à protéger, à soigner avec beaucoup d’attention. Ce qui en fait le prix.

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Nos actes suffisent-ils à nous décrire ?

Poser un acte. Posé, l’acte demeure là où il se trouve, comme un sac de gravats. Le sac appartient à qui le trouve autant qu’à celui qui l’a rempli et s’en est débarrassé, totalement dépossédé.

Inventorier les actes personnels, revendicables, oubliés, omis, récusés, et s’efforcer de ne pas donner le change à quiconque, pas plus qu’à soi-même.

Bene vixit, qui bene latuit inscrit bizarrement Descartes sur un carnet. Que faudrait-il cacher  pour vivre heureux ?

Si quelque chose est caché, l’encombrante conscience de cette dissimulation existe bel et bien. Je sais que je sais que j’ai enfoui ce que je sais.

Foin des postiches et autres moumoutes.

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Parfois une décision insensée, déraisonnable, fruit talé de l’existence, entraine des années difficiles avant un fiasco retentissant. Un échec ou une difficulté majeure peuvent cependant se révéler fondateurs par ce qu’ils inscrivent d’un avant et d’un après.

La conscience des actes accomplis en permet sans doute le détachement progressif. Elle offre une distanciation.

Le regret, comme le remords, fréquents objets de piété et de componction, sont toujours embarrassants. Ce qui a été demeure figé, il est impossible de le remanier ou de l’aménager. Connaître ce qui a été, le reconnaitre pour ce qu’il fut, permet de s’efforcer de percevoir et de mieux appréhender ce qui se présente à nouveau. Pas davantage.

L’Histoire enseigne que les assurances sont des escroqueries, et que la formule tous risques n’est que duperie. La pharmacopée ne met pas à l’abri des rechutes.

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Le détachement permet d’accueillir l’étrangeté de l’inouï. Si l’étonnement demeure sans s’imposer, il cesse d’aveugler et conserve une bienfaisante fraicheur.

L’outre passage.

De quoi sommes-nous vraiment le fruit ? D’un désir puissant, d’une présence absente, d’une méprise, d’une dissension, d’un hasard, d’autre chose encore ?

Nous n’y pouvons rien, nous n’avons aucun compte à demander. Nous sommes là parce que nous avons été engendrés, et cela devrait suffire.

Chacun se construit en taille douce ou à coups de burin. Dans les creux se sédimentent les acquis. Ce qui nous fonde et nous différencie.

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Rien ne vaut de ce qui est artificiellement ajouté, la gloriole gothique flamboyant d’un aïeul par exemple. Se mettre un aïeul à la boutonnière ne dissimulera jamais la veste élimée aujourd’hui portée, ni l’esprit étriqué.

A chacun de se faire soi-même.

Défi incessant. Défi impitoyable.

Rien ne peut excuser, justifier encore moins : nécessité cependant d’interrogations et de réflexions, pour tenter d’imaginer et de se représenter.

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Tout s’ajoute et se transforme.

Si rien ne demeure en l’état, rien ne se perd.

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Parmi ces multitudes qui vont et viennent, passent et repassent, s’affairent, discutent et s’affrontent, où certains se gobergent en faisant l’important, si celui-ci ou celui-là venait à disparaître à l’instant l’ordre du monde serait-il affecté, même très légèrement ?

Incessantes, les vagues polissent, elles effacent toute trace.

 

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M
Comme l'abeille, ici la lectrice aura de quoi faire un très bon miel. À butiner, petit morceau, par petit morceau et y revenir sans hésiter. Merci, cher Jean.
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